A Libourne (Gironde), le lycée Max Linder a été l'un des premiers à installer des distributeurs de protections périodiques financés par la Région. L’initiative fait partie d’un ensemble d’actions portées par les élèves pour lever les tabous sur les règles et la précarité menstruelle.
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Une initiative des élèves
Ils sont fixés au mur dans des couloirs, dans des lieux de passage « stratégiquement choisis » par les élèves pour être bien visibles et accessibles à toutes les personnes qui en ont besoin. Depuis le mois de février 2024, six distributeurs de protections périodiques ont été installés au lycée Max Linder, à Libourne (en Gironde) : cinq dans le lycée et un à l’internat. Parmi ces distributeurs de serviettes et de tampons, quatre ont été financés par la Région Nouvelle-Aquitaine.
L’initiative de cette installation revient aux élèves, qui ont créé une commission « luttons contre la précarité menstruelle » au sein du Conseil de vie lycéenne (CVL). Cette commission regroupe trois assistantes d’éducation, une volontaire en service civique et quatre élèves : Andrew Mazeau, Aliénor Magnant, Romane Nicou-Mendes et Zoé Lacueille.
Une question d’égalité entre les femmes et les hommes
« C’était un projet qui nous tenait à cœur », explique Julia Pinquié, une des assistantes d’éducation, très impliquées. Avant même l’installation des distributeurs, les élèves s’étaient déjà mobilisées autour de la question des règles et de la précarité menstruelle, complète Gwenaëlle Breut, également assistante d’éducation.
Ainsi, l’inauguration officielle des distributeurs a été l’occasion d’une journée de sensibilisation et d’ateliers autour des règles. Cette inauguration a eu lieu le 8 février 2024, en présence de Catherine La Dune, vice-présidente du Conseil régional en charge du handicap, de l'égalité et de la lutte contre les discriminations, et Laurence Rouède, vice-présidente du Conseil régional en charge du développement et de l’équité des territoires. Après le traditionnel coupé de ruban, symboliquement placé autour d’un distributeur neuf, lycéens et lycéennes ont pu profiter de plusieurs ateliers et stands : atelier de création de bouillottes (contre les douleurs des règles), stand sur les différentes protections périodiques, stand d’information et de documentation…
Qu’est-ce que la précarité menstruelle ?
Surtout, reprend Julia Pinquié, « il y a eu un passage dans chaque classe pour que tout le lycée soit au courant et connaisse les termes de précarité menstruelle ». Car parler du sujet, et ouvrir des temps de discussion, reste encore indispensable. Selon la définition du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), la précarité menstruelle « désigne les difficultés de nombreuses femmes et filles à se payer des protections hygiéniques à cause de leurs faibles revenus. » La difficulté à pouvoir acheter des protections hygiéniques peut alors les pousser à rester chez elles et à ne pas se rendre à l’école ni au travail.
La précarité menstruelle n’est pas seulement une question économique : c’est aussi une question politique et sociale, et d’égalité entre les femmes et les hommes. Et cette précarité n’affecte pas que les personnes qui vivent dans les pays en développement. Elle touche également celles qui vivent dans des pays riches et industrialisés. Aggravée par la crise sanitaire, écologique ou encore énergétique, la précarité menstruelle concerne 15 % des personnes menstruées en France, selon le rapport ministériel de 2022 sur l'égalité entre les femmes et les hommes.
« Rendre visible les menstruations, pour dire que cela fait partie de la vie quotidienne »
Au Lycée Max Linder de Libourne, « on voit qu’il y a vraiment une demande pour les distributeurs de protections installés », poursuit Gwenaëlle Breut. En deux mois, environ 500 tampons et 600 serviettes ont été utilisées. « Et aucune dégradation n’a été commise, remarque Zoé Lacueille, élève de terminale. On ne retrouve pas de serviettes ou de tampons par terre ou abimés. Les protections sont vraiment utilisées consciemment. » « Ces distributeurs sont utiles pour les élèves mais aussi pour tout le personnel du lycée. Il y a des professeurs ou du personnel chargé du nettoyage qui viennent nous signaler quand ils sont vides », raconte Gwenaëlle Breut.
Libérer la parole sur les règles
Surtout, la pose des distributeurs a permis de libérer la parole sur les règles. Leur installation a fait l’objet d’une réflexion poussée, précise Romane Nicou-Mendes, élève de seconde, pour « ne pas genrer » ces distributeurs et les reléguer aux toilettes des filles. Dans des couloirs ou dans la salle de vie scolaire, les distributeurs « rendent visibles les menstruations, pour dire que cela fait partie de la vie quotidienne de la moitié des élèves du lycée », souligne Julia Pinquié. L’idée est aussi de rompre le sentiment d’isolement des élèves. « Beaucoup de lycéennes sont venues nous dire ce qu’elles vivaient ou ce qu’elles avaient vécu. Beaucoup de garçons également nous ont dit qu’ils n’en savaient rien. »
L’accueil très positif fait à ces distributeurs a ouvert la porte à d’autres actions prévues, comme une collecte de pantalons, qui pourront être prêtés en cas de tâche de sang, ou encore des actions de sensibilisation sur le syndrome prémenstruel ou l’endométriose. Au total, avec ces distributeurs installés au lycée Max Linder, ce ne sont pas moins de 1000 personnes menstruées, parmi les 2000 élèves, qui peuvent désormais bénéficier de protections périodiques gratuites.
Le financement des distributeurs de protections périodiques fait partie des actions de la Région Nouvelle-Aquitaine pour la lutte contre les discriminations et la promotion de l’égalité. Initiée en 2023, cette démarche a déjà abouti, début 2024, à l’installation de 328 distributeurs au sein de 212 établissements publics en Nouvelle-Aquitaine. La Région finance l’achat des distributeurs et un premier réassort des protections. Les recharges suivantes sont à la charge des lycées. La Région a également lancé un appel à projet intitulé « Lutte contre la précarité menstruelle en Nouvelle-Aquitaine » dans le but de financer des actions concrètes contre la précarité menstruelle.
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